« Où en est le projet d’éducation populaire pour la jeunesse des quartiers ? ». Cette formation a été organisée dans le cadre de la politique de la ville
par la Fédération de l’Entraide Protestante (FEP), la Mission Populaire Évangélique de France (MPEF) et l’association Soleil et Santé, les vendredi 19, samedi 20 et dimanche 21 septembre à Rezé, près de Nantes, au Centre des Naudières, dans une ambiance sérieuse mais chaleureuse.
Les axes de réflexion de cette formation ont été les suivants : réfléchir sur les dynamiques existantes dans les quartiers et sur la place de l’éducation populaire dans les politiques publiques des villes, en France et aussi dans d’autres pays ; concrètement, repérer des éléments-clés pour élaborer dans nos associations des projets d’éducation populaire centrés sur la jeunesse.
Le vendredi soir, tous les participants se sont retrouvés pour une table ronde. Celle-ci a resitué l’histoire de l’éducation populaire depuis Condorcet et le 18ème siècle jusqu’à nos jours, avec l’intervention de Jean Bastide, président de France-Bénévolat. Les témoignages de Patrick Rimbert, 1er adjoint au Maire de Nantes et d’Augustin Lebreton, prêtre dans le quartier populaire de Bellevue à Nantes pendant des décennies, ont complété cette intervention.
Samedi matin, trois projets de mouvements de jeunes ont été présentés par leurs responsables :
– le scoutisme, Éclaireuses et Éclaireurs Unionistes de France (EEUdF), par Kim Delagarde, et la construction patiente depuis 1997 de son projet éducatif ;
– la démarche du Réseau Jeunesse de l’Église Réformée de France (ERF), par son chargé de mission Geoffroy Perrin-Willm, et son projet éducatif élaboré depuis 2005, qui débouchera sur un grand rassemblement de jeunes à l’été 2009 ;
– l’association Soleil et Santé, créée en 1931 par la MPEF pour animer ses activités de jeunes ; Pierre Vergnolle a situé sa professionnalisation dans l’animation et la formation depuis les années 70, et sa fonction, aujourd’hui, de creuset de la réflexion de la MPEF pour le renouvellement de ses activités tournées vers les jeunes.
Cinq ateliers d’une douzaine de participants ont alors travaillé sur ces projets pour repérer des éléments-clés pour construire un projet éducatif dédié à la jeunesse dans les quartiers ; travaux qui ont été affichés pour une mise en commun.
L’après-midi, plusieurs textes bibliques présentés par Emmanuelle Mouyon, animatrice biblique de l’Eglise Réformée-Ouest, ont été repris par les mêmes groupes dans une approche incluant les dimensions culturelles des publics auxquels nous nous adressons.
Puis un troisième temps a porté sur nos pratiques associatives : les valeurs, le fonctionnement institutionnel, les publics et les partenariats qui sous-tendent nos actions. En quoi nos actions ressortent-elles du mouvement de l’éducation populaire ? Les réflexions élaborées ont été, elles aussi, affichées, et seront reprises dans le compte-rendu de la formation.
Samedi soir, Joëlle Bordet, psychosociologue spécialiste de la politique de la ville dans le cadre de projets de rénovation urbaine, en France et dans d’autres pays du monde, a exposé son expérience française et internationale. Elle constate que, sur un territoire donné, les pouvoirs publics choisissent entre quatre approches : la « régulation technique » fragmentant les problèmes pour les résoudre ; une « participation plus démocratique » des habitants ; le « clientélisme » en achetant la paix sociale ; enfin le schéma plus « sécuritaire » avec sa spirale d’exclusions de populations « à risques ». Et dans un contexte de concentration des problèmes socio-économiques (chômage, économie souterraine, échec scolaire, discrimination, etc. dans les quartiers populaires), souvent le discours politique détourne l’attention des problèmes de fonds en parlant de replis ethniques ou identitaires et renforce la ségrégation. Elle a appelé à regarder un quartier non pas à partir de ses problèmes mais de ses potentialités, et comme au Brésil dans certaines favelas en recherchant les ressources collectives des jeunes désirant le changement et en encourageant leur curiosité.
En conclusion, Joëlle Bordet insiste sur les « grosses colères », notamment celles que provoquent les discriminations à la sortie du système scolaire. Les jeunes ont besoin d’interlocuteurs adultes fermes. Le métier des éducateurs de prévention dépend du tissu local et réclame de rencontrer les jeunes la nuit… D’où la nécessité d’aller au devant d’eux et d’agir selon la démarche de « faire grandir vers l’autonomie ».
Le dimanche matin, après la collecte des fiches d’évaluation à synthétiser, nous étions invités par la Fraternité de Nantes pour célébrer un culte en commun, pour le repas et pour visiter ses activités. Et le soleil était de la fête !
Bernard Serres, 1er octobre 2008