Du cahier de doléances au forum social, en passant par la fête  et les élections

Voilà plus d’une année, l’association « Collectif Liberté Egalité Fraternité Ensemble Unis » plus connue par son sigle ACLEFEU s’était fixée pour mission d’aller à la rencontre de la population des quartiers populaires, d’écouter ce que les personnes souhaitaient exprimer et de remplir des cahiers de doléances, dans le droit fil de ce qui s’était passé en 1789 à la Révolution française lorsque le peuple français avait pu choisir pour une première fois une façon d’exprimer ses opinions.

C’était juste après les émeutes de novembre 2005 et il fallait agir pour un cessez le feu, car cette association affirme que les meilleurs armes pour se faire entendre restent encore la participation citoyenne à la démocratie. De la synthèse de quelques vingt mille contributions récoltées, il ressort l’importance de l’arrêt des discriminations en matière d’accès à l’emploi, au logement, à la culture et à l’éducation, l’attente d’une justice équitable et le contrôle des pratiques policières, ainsi que le respect du fait religieux. Besoins exprimés, discutés, retranscrits : les mots disent aussi l’importance du regard, l’attente de l’écoute. La volonté de vivre dignement conformément à la devise de la République, Liberté Egalité Fraternité, est sans conteste la priorité de toutes les personnes qui se sont exprimées. Leur conviction est quasi-intacte, quel que soit leur âge, leur origine, leur lieu de vie, pour prendre leur part d’une solidarité effective visant une transformation positive de la société. Devenir actrices de changement, s’impliquer à condition d’être écoutées, à condition que la parole donnée soit respectée.

Et voilà qu’une nouvelle initiative tente de donner la parole aux habitants des quartiers : un « Forum social des quartiers populaires » se réunit pour la première fois en cette fin juin 2007, en banlieue à Saint Denis. Ce mouvement explique que les quartiers sont riches d’histoire(s) et de traditions d’engagements, combats constitutifs de l’histoire politique, sociale, syndicale, culturelle, festive de ce pays. Histoire qu’il faut se réapproprier, à l’image d’un événement fondateur et fortement symbolique dont chacun peut être fier : la Marche pour l’Egalité et contre le Racisme de 1983.

Deux initiatives donc, deux méthodes aussi. Nous savons combien les initiatives vécues sont porteuses de richesses, d’expériences partagées et peuvent nous remettre en route avec réconfort, idées nouvelles, et joie.

Entre les deux, il y aura eu, dans notre ville, une fête : la « Fête des 3 quartiers ». Superbement réussie. Un monde fou dans la cour de l’école Langevin, une bonne humeur et une belle ambiance, le plaisir de se rencontrer, de se retrouver, de jouer, de manger, de sourire, de parler.

On peut se retrouver dans ce qu’exprime une amie du quartier de la Reynerie* : « Habiter dans le quartier donne une perception particulière de la situation, qu’il est difficile de communiquer à ceux qui n’y vivent pas. Ici, des milliers de personnes dignes et aimables savent trouver au quotidien les gestes et les paroles qui rendent la vie possible et humaine. Ici se vit un mélange étonnant de cultures et de religions ; c’est extraordinaire que la vie quotidienne y soit aussi paisible malgré la galère que beaucoup vivent… »

Entre les deux, il y aura eu aussi, dans notre pays, des élections. Un nouveau chef de l’Etat, des représentants du peuple, élus ou réélus. Là, il nous faudra peut-être attendre un peu pour comprendre comment les choses vont vraiment évoluer. Entre un discours carré qui tend à accentuer les clivages dans la société, et la constitution d’une équipe de pilotage qui tente, avec un culot certain, de faire place à la diversité… A suivre.

Robert Mollet

*) Témoignage « Durer dans le béton » extrait de Le Sept, bulletin d’opinion et d’information dans le quartier du Mirail (Toulouse) édité par l’association TO7 (mai 2007)