Cette année 2006-2007 a connu des temps heureux et d’autres bien sombres.
1/ Des temps heureux, des temps sombres :
La MPEF, avec son histoire, sa mémoire, ses choix et ses actions, participe à l’aventure humaine.
Cette communauté ne se réduit pas à elle-même, elle n’a pas de frontières, elle est ouverte, accueillante, structurante, sans être étouffante. Chacun y est invité à égalité, valorisé par les liens fraternels.
Là, dans ce lieu aux multiples facettes, l’Evangile crée, d’une manière qui nous échappe le plus souvent, l’événement, Il transforme les hommes et les femmes, Il bouleverse les situations, Il apporte du sens et de la saveur, du souffle et du courage.
Des équipiers ont rejoint, en Juillet 2006, cette Communauté de partage. Nous les saluons :
– Laurent Schlumberger exerce son ministère pastoral au Foyer de Grenelle, où il s’est installé avec Sophie, tandis que Chantal et Jean-Pierre Molina se sont laissés apprivoiser par les habitants et les paysages du sud.
– Stéphane Lavignotte, pasteur – proposant, a accepté de prendre le relais à la Maison Verte, après le départ d’Eric Masse. Stéphane réside dans le 10ème arrondissement de Paris où Véronique a une responsabilité politique.
– Dominique Keller a succédé à Lambert Van Dinteren, à la Fraternité de Saint-Nazaire, pour y accomplir une mission durant une année.
Nous nous réjouissons de ce renouvellement du corps des équipiers, et nous souhaitons que ces amis s’épanouissent dans ce travail parfois rude et exigeant, souvent surprenant et enrichissant.
Ce mouvement signifie qu’il y a eu des départs :
A Nantes, Titia et Redouane Es-Sbanti ont laissé un grand vide. Une équipe autour d’Hélène Cavalié donne le maximum de temps et d’énergie pour que la maison fonctionne dans les meilleures conditions.
Edouard Faba, après plusieurs années au service de Soleil et Santé et du Picoulet, reste cependant un recours précieux pour la MPEF.
Bryan Parrish va quitter la fraternité de La Rochelle après dix-neuf ans de service. Sa présence a été reconnue et appréciée, son ministère a rayonné au-delà de la fraternité et dans toute la ville. Nous lui disons notre profonde reconnaissance.
Bruno Ehrmann quant à lui, a été maintenu, pour un an, équipier retraité-bénévole, au Foyer de Grenelle, en attendant la relève. Qu’il en soit vivement remercié. Avec Babette, il agrémentera son temps entre le Poitou et Paris, tout en restant actif dans de nombreuses associations, notamment au sein de la MPEF, comme membre du Comité National, et de son Bureau.
Il nous a été donné de vivre deux belles fêtes anniversaires grâce aux fraternités de Nantes et du Picoulet, des ouvrages ont été édités à cette occasion. Savoir que l’on est issu d’une histoire, faire mémoire, non pour la fossiliser, mais pour marcher vers un avenir de vie, aide à dessiner les contours du futur.
Dans ce paysage serein, une terrible nouvelle nous a profondément attristés avec la mort de Christian Garin. Cet ami a beaucoup compté dans la MPEF. Bertrand Vergniol, présent au culte d’action de grâce à Lausanne, a retracé son cheminement, et l’a exprimé avec émotion. Christian fondait sa foi sur le Christ. C’est sur lui qu’il s’appuyait pour essayer de rendre notre monde plus beau et plus humain. Nous avons pour Anne et ses fils une pensée affectueuse. La voix de Christian manquera à tous ceux qui l’aimaient.
Christian avait pris une part active à la préparation de la rencontre des équipiers à Rouen. Convaincu de la spécificité de la MPEF, toute sa vie il a jeté des ponts entre la Suisse et la France, ardent militant, il avait demandé à venir passer quelques années pour servir dans une Fraternité, à Roubaix précisément, où il a exercé son ministère pendant un an et demi.
2/ Jalons qui ont marqué l’année :
– Les séances du Comité National :
Les Echos du CN rédigés par le président permettent aux équipiers et aux présidents des fraternités d’être régulièrement informés de ce qui se vit au sein de la MPEF.
Dans l’ensemble, le lent et patient processus de consolidation et de clarification, commencé il y a plusieurs années, porte ses fruits : avec le Congrès de La Rochelle, avec l’élaboration des nouveaux statuts et des conventions, avec les visites du secrétaire général, avec l’attention soutenue du président et du bureau, dans un dialogue confiant et critique, avec une gestion financière bien tenue et maîtrisée.
Nous avons été confrontés néanmoins, à plusieurs grosses difficultés à la Maison Verte et à Roubaix. Le comité national et le secrétaire général y ont fait face, avec détermination et dans la douleur, avec le souci de sauver la situation . Afin de prévenir de tels problèmes, il était nécessaire de faire une analyse objective et d’en tirer les conclusions qui s’imposaient.
En effet, une crise n’arrive pas soudainement et par hasard, elle naît de problèmes institutionnels ou personnels, il faut avoir le courage de les affronter avant qu’ils ne s’enveniment et perturbent gravement la vie d’une fraternité.
Le comité national réfléchit, à cet égard, à mettre en place un code de déontologie et une instance d’alerte et de vigilance, qui permettraient de flairer, voire d’anticiper les problèmes, de dénoncer les dysfonctionnements, d’aider à les résoudre, dans un dialogue et une écoute fraternels et exigeants.
– Dialogue et écoute :
Pour que la Mission Populaire forme un corps harmonieux, il est essentiel que se poursuive cet état d’esprit, ce style de relations :
Dialogue entre les fraternités :
– avec une vie régionale qui se remet en route : en Juin, une journée conviviale, avec des temps d’échanges, a réuni à Trappes des personnes et des familles venant d’horizons différents. D’autres sont prévues, en particulier à Lyon, avec le comité suisse, Toulouse Ouverture, la Mirly, les fraternités de la Belle-de Mai et de La Duchère, sur le thème : « accueillir : passer de l’attitude stéréotypée à l’exigence d’une vocation ».
– avec des rencontres organisées entre permanents, et qui permettent aux uns et aux autres de se ressourcer, de se parler, de se confier, de se former, de sentir une communion dans un même service.
Dialogue avec les instances nationales :
La rencontre des trésoriers, présidents, et permanents, très suivie par les fraternités, leur assiduité en est le signe, est devenue un lieu d’analyse, de propositions, de concertation, de formation et de solidarité. Les fraternités participent ainsi activement à la politique générale de la MPEF.
L’assemblée générale nationale, les lettres d’automne et de printemps, les circulaires, le journal Présence, Partage, sont autant de ponts qui permettent de porter ensemble l’institution.
Un autre lien pourrait s’instaurer lors des assemblées générales des fraternités, avec la participation systématique d’un représentant désigné par le comité national et invité par la fraternité, pour prendre part aux débats, expliquer les choix et la politique du Comité National, pour entendre et prendre en compte les attentes des fraternités. Cet aller-retour consoliderait la communication et la cohésion de l’ensemble de la MPEF.
Les Conventions signées par la plupart des fraternités, sont un profond changement dans la vie institutionnelle de la MPEF. En quelques mots, j’en rappelle l’importance : Les conventions sont les documents contractuels qui justifient et clarifient les mises à disposition de personnes, de locaux et de services, et les versements mutuels correspondants, entre les Fraternités et la MPEF.
Elles ont été mises en route dès l’Assemblée Générale de janvier 2006 sous une rédaction-type générale ; elles ont donné lieu à des discussions et explications vives, et des propositions de révisions, ce qui est normal car elles touchaient aux forces vives de toutes les parties.
Un an après leur lancement, elles sont aujourd’hui pratiquement toutes signées ou en cours de signature.
Dialogue avec les partenaires :
Nous prenons conscience à travers des échanges, des réflexions sur l’éducation populaire, des débats théologiques, des rencontres sur les problèmes de société, que nous sommes en mesure de poser, avec nos partenaires « naturels »( les EOP, Soleil et Santé, la Croix-Bleue, les comités suisse et britannique, les missions urbaines etc… ), les bases d’un Mouvement du Christianisme Social. L’idée d’un grand Rassemblement en 2009, initié par la MPEF, sur le thème du travail, pourrait en être les prémices.
– Autour de la Parole publique
La rencontre des équipiers:
Est un temps souvent vécu avec plaisir. Il permet cette distance nécessaire pour faire le point. Il permet un échange avec le Comité National. Il offre un espace de formation et de détente. Des partenaires et des amis se joignent à ces moments. En Septembre, près de Rouen, Henry Mottu, et Christian Garin ont introduit le thème : « Avons-nous une Parole Publique ? » La parole d’une Eglise ( ou son silence ! ) est publique au premier sens : elle touche le collectif d’un peuple entier, le politique. Pour être en mesure de prendre la parole il faut faire un travail critique, il faut favoriser un débat interne, et avoir des réflexions et des outils.
Il faut du courage. La pratique libre de Jésus ( cf. les Evangiles ), sans préalables ni conditions, – mais non sans confrontations ! – invite à dire le vrai des situations publiques et populaires, en regardant en face les menaces de souffrances, les pressions des autorités, les jugements du monde. Pour ne pas éroder la parole publique, il faut la prendre à bon escient, et (ré)apprendre l’art de fabriquer des prises de position. Réfléchir à leur support : texte, geste, acte symbolique, déclaration.
Alors , « avons-nous une Parole publique ? ».
« Si tu fermes ta porte aux cris de ton voisin, ils te parviendront par la fenêtre »
( proverbe arabe)
Les cris sont nombreux, avec la montée des peurs et des violences, la ghettoïsation sociale et urbaine, la résignation, l’évasion ( alcool, drogues, addictions ), l’incurie des décideurs. Les cris sont nombreux face à un messianisme de la croissance, du travail, de la consommation, au détriment du bien être de la nature et des êtres humains.
Ils le sont face à la menace écologique.
En écho à ces cris, une caractéristique anime les membres de la MPEF : « Espérer, croire à un avenir, ne pas baisser les bras, offrir un lieu de parole et pour la Parole. »
Cette espérance se concrétise dans les fraternités, par des gestes d’ouverture, des signes de réconciliation, des combats contre les forces malignes, des détresses surmontées ; des pans entiers de murs de fatalisme tombent, les muets osent parler, les courbés se redresser. cette réalité s’exprime par les rencontres en interne et dans les quartiers, par les formations, les solidarités, la rédaction de journaux, les débats, les fêtes, les célébrations.
Dans les fraternités il y a de fait une Parole publique.
Sur le plan national :
Cette Parole est relayée à travers des réseaux, des contacts, des interventions des membres de la MPEF, du Président et du bureau, du Secrétaire Général. Elle est aussi reprise par le journal Présence, dans ses articles, ses éditoriaux, et ses dossiers. Pour que cette Parole ait plus d’échos, la commission Présence, en accord avec le Comité National, propose de diffuser largement, quand l’événement l’impose, « un tiré à part recto-verso », apportant des éléments de réflexion ou une prise de position officielle de la MPEF. Cela aurait pu être fait au moment de la crise du CPE, des expulsions à Cachan …
Dans le quotidien de ses Fraternités, et du National, la Mission Populaire a une Parole publique. Mais est-ce satisfaisant ? Est-elle assez présente dans le concert des Associations ? Y a-t-il un déficit d’interventions publiques de la part de la MPEF ? Faut-il déléguer des représentants de la MPEF pour intervenir lors de débats, de manifestations, de campagnes ? Faut-il que la MPEF intervienne plus souvent dans les médias ? Il serait intéressant de connaître le point de vue de notre Assemblée.
A l’horizon :
Ce rapport est en continuité avec celui que j’ai rédigé l’an dernier.
Certaines activités se sont concrétisées : l’accueil des enfants par les familles suisses et mazamétaines a été très positif, déjà des enfants sont inscrits pour un prochain séjour ; pendant l’année, certains gardent des liens précieux avec les familles.
Des questions restent d’actualité : la composition du Comité National, sa représentation, le renouvellement des commissions, la création d’une commission immobilière, la pertinence de nommer un animateur biblique au plan national, la mise en place d’une charte des braderies, miettes ou vestiaires, une réflexion sur la création de nouvelles fraternités pas seulement orientées vers un service social, mais aussi vers des temps de partage sur la vie personnelle et professionnelle et communautaire…
Quelques fraternités ont précisé leurs objectifs. Une synthèse, jointe à ce rapport, a été préparée par Robert Olivier et Bernard Serres. Elle en montre les évolutions, les priorités, les innovations, les convergences. Ce document est précieux et pourra être repris dans les conseils.
Après quelques années de service à vos côtés, je transmettrai le relais au pasteur Jean-Pierre Rive. Les hommes et les femmes passent, avec leurs forces et leurs failles … l’histoire de la MPEF continue, inspirée par la parole du Ressuscité, entraînée vers des chemins nouveaux. Je souhaite à Jean-Pierre qu’il puisse aider à maintenir ce cap, et à tisser des liens de fraternité, ceux-là mêmes qui m’ont permis de tenir le coup, et pour lesquels je vous remercie tous, du fond du cœur.
Richard Dahan